Il nous a forjuré aussi comme musart.
Quant la damme l’oy, de dueil le cuer ly art.
Ay enfans, dist elle, mal resembles wichart,
Car pas n’avez le corps honneste ne gaillart.
Ou aves vous esté, ne en con faist essart ?
Damme, ce dist Regnault, vous le savez a tart,
Car de grant povreté avons heü no part.
Et il lui raconte combien ils ont souffert dans la forêt d’Ardenne.
La duchesse embrasse ses enfants et s’évanouit. Ils la relèvent ; elle reprend ses sens et leur dit que leur père, malgré les apparences, est très affligé de leur sort. — Elle ne répond donc pas à la question que Renaud lui a posée avec tant de rudesse. Ce reproche de bâtardise, lancé par Aymes comme une injure, a frappé Renaud. Faut-il supposer qu’il a son origine dans quelque forme ancienne de la légende ? L’insistance de Renaud est-elle seulement due à la gaucherie de l’auteur ? Faut-il voir là un point de contact entre cette composition et la version néerlandaise ? Faut-il penser à la légende de Gondovald ?
Cependant le duc revient de la chasse. La duchesse va à sa rencontre, et quand tout étonné il regarde ces étrangers, elle lui apprend que ce sont ses fils. Il leur demande comment ils osent se présenter à lui dans un tel état.
Quant le duc a veü les hoirs qu’il engenra,
Hautement leur a dit : Signeurs, comment vous va ?
Ou avez vous esté ? au charbon longtemps a.
Sire, ce dist Regnault, par Dieu qui tout crea,
Vous voyes tot l’avoir c’oncque Dieu nous donna.
Maudist soit, dist li dus, qui si vous amena,
Ne qui en si fait point a enfant vous tenra,
Car je croy que mes corps point ne vous engenra
Ne la franche duchesse oncque ne vous pourta,
Car vous fustes changié quant on vous alaita.
Se de mon sang fussies, vous ne venissies ja
Venu (sic) en si fait point que mon corps vous voit la,
Or n’a il homme nul de sa mer ne de la,
S’il venoit en cest point, que je l’ammasse ja.