Aller au contenu

Page:Castor - Le pays, le parti et le grand homme, 1882.djvu/50

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 53 —

moins tout un parti politique, à suivre un chef quelconque ou une direction quelconque, de crier : Discipline ! obéissance ! fidélité au parti !

Non ! il y a des principes plus forts que ces mots retentissants ; des devoirs liant plus étroitement les hommes politiques à la cause du droit et de la justice que certains liens éphémères ne les lient aux intérêts d’un parti, une autorité supérieure à celle des chefs de parti les plus universellement acclamés, supérieure par conséquent à l’autorité de certains chefs d’occasion, qui ne sont que des soldats de fortune.


IV


PARCE QUE ? OU QUOIQUE ?


Ce droit au commandement absolu, même arbitraire, M. Chapleau, dira la Minerve, l’a acquis par droit de conquête. N’est-ce pas lui qui a remporté les élections de décembre 1881, cette victoire sans précédent, qui a pulvérisé le parti libéral et assuré aux conservateurs au moins cinquante comtés sur soixante-cinq ?

Eh bien non ! M. Chapleau ne nous a pas ainsi conquis. Lui attribuer tout le mérite de cette grande victoire est l’une de ces exagérations ridicules que les organes ont mises à l’ordre du jour, dès qu’il s’agit de M. Chapleau. M. Chapleau a, depuis vingt-cinq ans, pris une très large part au travail des élections en général et aux luttes oratoires en particulier : nous nous plaisons à le reconnaître ; il dispose d’une grande puissance d’élocution et sa parole produit sur les foules un effet considérable : nous le concédons volontiers, et nous lui en donnons ample crédit. Rappelons de suite qu’il en a été payé au centuple pour le moins, soit par le patronage qu’il a reçu, soit au moyen de positions importantes données tant à lui qu’à toute sa famille, soit enfin par la réputation presque féerique et le piédestal grandiose que, en retour, les organes du parti lui ont édifiés.

Il a péroré dans les élections :

A-t-il fait plus, dans ce sens que le célèbre Charles Thibault ? Ce dernier ne peut-il pas comparer avec avantage, tant sous le rapport de l’effet magique sur les foules que sous le rapport des résultats produits, ses campagnes électorales avec celles de M. Chapleau ? Et de plus, combien d’exploits accomplis par Thibault, dans des circonstances où Chapleau eût échoué ! Combien de campagnes difficiles entreprises par Thibault où Chapleau ne se serait pas risqué !

M. Chapleau paraît s’être multiplié pour adresser la parole sur presque tous les points de la province. S’y rendait-il pour faire des luttes difficiles et profitables ? Ne faisait-il pas plutôt, de toutes ces pérégrinations, un moyen d’augmenter son prestige personnel, de