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ment et fait triompher le drapeau dans dix comtés, terrassé les plus redoutables adversaires, traité de main de maître les questions les plus épineuses, fait nombre de suggestions utiles, émis des idées nouvelles du plus grand prix, assuré le succès des mesures les plus propres à promouvoir l’intérêt du pays : tout cela est inutile.

Le mot d’ordre, c’est de vous ignorer ; la presse entière se taira systématiquement sur tout ce que vous aurez fait.

Et tandis que le moindre valet de la clique, ses nullités les plus insignifiantes seront élevées jusqu’aux nues, l’on ne fera aucune mention de vos travaux les plus importants ; l’on n’enregistrera pas même vos états de service. Aux yeux de vos chefs et du pays, vous serez censé n’avoir rien fait ! C’est ce que voulait la clique : elle a réussi.

Aussi, n’allez pas vous faire illusion : vous avez encouru la défaveur de la clique ; vous êtes irrémédiablement condamné à n’avoir jamais aucun avancement ! Votre carrière politique est à jamais brisée ! Car les chefs ont consenti à se faire les aveugles exécuteurs des vœux de la clique. Les portefeuilles, les hauts emplois : tout cela, c’est pour les nullités patronisées par la clique !


V


Voilà comment est servi l’intérêt du pays ! Et pourtant, vous avez à vous seul plus de solide popularité, plus d’influence que toute la clique ensemble ! Investi de la confiance de vos compatriotes, vous êtes l’un des conseillers naturels de vos chefs politiques. Vous avez droit à l’influence et au patronage que commande votre position. Cela n’empêche pas cependant que certains freluquets, sans mandat, sans popularité, sans valeur quelconque ont voix au chapitre, même dans les conseils de l’exécutif, et disposent du patronage qui vous appartient !…

Ils sont membres de la clique, voyez-vous !… Et quand à vous, vous n’êtes bon qu’à porter, vis-à-vis le pays, la responsabilité des manœuvres ténébreuses et des tripotages véreux de la clique ! Votre rôle, à tous, c’est de voter en rangs serrés, au nom de la discipline, pour garder à la clique le pouvoir qu’elle exerce, à votre détriment et pour la ruine du pays !…


VI


Et nous conservateurs, depuis des années nous avons subi tout cela !…

Bien plus ! si nous laissons entendre quelque récrimination, quelques mots de critique, nous sommes impitoyablement chassés des rangs du parti…

Voilà d’après quel principe M. Chapleau a régné avec sa clique !… Voilà comment il a choisi et ses collègues dans le ministère, et ses