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Page:Cavallucci - Bibliographie critique de Marceline Desbordes-Valmore, tome 2.pdf/119

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LILIAS (Redgauntlet) Le repas du soir est préparé dans une chaumière d’Ecosse, devant quatre convives muets. L’un d’eux, jeune voyageur qui tient sa place devant l’immense cheminée que lui disputent deux chiens frileux, trouve étrange, à part lui, de voir, dans ce pays tout protestant, le rosaire aux grains d’ébène, d’où pend un crucifix d’argent, dans les mains d’une femme dont l’aspect le repousse. En même temps, l’hôte commande le bénédicité, ajoutant du ton du sarcasme, en se retournant vers le jeune inconnu : “Monsieur l’attend 11° La vieille femme se récuse en baisant le Christ ; car ses lèvres ne veulent pas s’ouvrir pour répondre. Un serviteur au regard sinistre s’en défend avec la voix rauque d’un ours mourant:l’inconnu ne se signe que dans son cœur; et le maître de tous se courrouce contre tous. Puis, voilà qu’une porte s’ouvre et laisse entrer une jeune fille que l’on dirait un ange. Elle s’avance timide et empressée, pour obéir au commandement qu’elle croit avoir entendu, et sa voix argentine récite tout haut et pour tous le bénédicité refusé par chacun. Cette tâche céleste remplie, elle s’échappe sans bruit comme elle est entrée, et l’esprit de conciliation semble avoir passé dans la chambre. Telle est la première apparition de Lilias dans le livre terrible de Redgauntlet. Jamais frère rencontra-t-il sa sœur dans une circonstance plus propre à la lui faire aimer ? Jamais l’imagination pure d’un jeune homme ami du merveilleux obtint-elle de son génie une aventure plus propice à la faire rêver ? Bientôt après une belle personne fait demander une audience à son avocat absent, dont le fils, avocat lui-même, arrange ses livres dans l’étude, de manière à leur donner un air de désordre agréable, vers l’heure où la dame à la Mante verte doit revenir. Il s’habille en élégant négligé de matin,