Aller au contenu

Page:Caylus - Souvenirs et correspondance.djvu/61

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jour, croyez-moi, il vaut autant manger tout à l’heure. Ce discours la persuada ; elle se fit apporter un gigot de mouton. C’est lui encore à qui l’on demanda comment il pouvoit faire pour être si légèrement vêtu en hiver, à quoi il répondit ! Je gèle de froid[1].

Le maréchal d’Albret avoit deux parentes qui demeuroient avec madame sa femme, mademoiselle de Pons, et mademoiselle de Martel, toutes deux aimables, mais de caractère différent. Ces deux filles ne s’aimoient pas, et ne s’accordoient guère que sur le goût qu’elles avoient l’une et l’autre pour madame de Maintenon.

Madame de Montespan, parente aussi du maréchal d’Albret, se joignoit à cette société, et c’est là qu’elle connut madame de Maintenon. Elles se plurent mutuellement, et se trouvèrent l’une à l’autre autant d’esprit qu’elles en avoient en effet.

Madame de Maintenon avoit encore l’hôtel de Richelieu, où elle alloit souvent, également désirée partout ; mais je parlerai ailleurs de M. de Richelieu.

C’est sans doute à peu près dans le même temps qu’une des princesses de Nemours devint reine de Portugal[2]. Les amis de madame de Maintenon lui parlèrent si avantageusement d’elle qu’elle eut envie

  1. M. de Lescure dans son édition des Souvenirs (Paris, Lemerre) corrige ce passage d’une manière qui nous paraît assez malheureuse. Au lieu de Je gèle de froid, réponse simple et naturelle, il imprime Je gèle le froid, ce qui eût été une réponse affectée et prétentieuse.
  2. * Marie-Françoise-Elisabeth de Savoie-Nemours, dite mademoiselle d’Aumale, épousa Alphonse VI, roi de Portugal, le 25 juin 1666.