Page:Cellini, Oeuvres completes, trad leclanché, 1847.djvu/57

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— Oh ! mon bon fils, c’est avec ces armes que tu dois vivre ou mourir ! » — Piero Landi, qui était présent, ne cessait de pleurer. Il me donna dix écus d’or. Je le priai de m’arracher quelques petits poils de la barbe, mon premier duvet. Frate Alesso me déguisa en religieux, et chargea un frère convers de m’accompagner.

Je sortis du couvent par la porte al Prato, et j’allai jusqu’à la place San-Gallo, en marchant le long des murs, Je gravis ensuite la côte de Montici, où je trouvai dans une des premières maisons le Grassuccio, frère de messer Benedetto de Monte-Varchi. Dès que je fus défroqué et redevenu homme, nous montâmes sur deux chevaux qui étaient préparés pour nous, et nous atteignîmes Sienne pendant la nuit.

Le Grassuccio retourna à Florence, alla saluer mon père et lui annonça que j’étais arrivé à bon port. Mon père en fut au comble de la joie. Les minutes lui semblèrent des siècles, jusqu’à ce qu’il eût retrouvé celui des Huit qui l’avait injurié. Enfin, l’ayant rencontré, il lui dit : — « Voyez-vous, Antonio, que Dieu seul savait ce qui devait advenir à mon fils ! » — « Eh bien, répliqua l’autre, dis-lui qu’il nous retombe entre les mains. » — « Je remercierai Dieu qui l’en a tiré, » répondit mon père.