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Page:Cervantes - L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche, traduction Viardot, 1837, tome 2.djvu/242

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velle et périlleuse aventure. Puis, d’une voix haute, il s’écria : « Ô dame de mes pensées, maîtresse de mes actions, illustre et sans pareille Dulcinée du Toboso, s’il est possible que les prières et les supplications de ton amant fortuné arrivent jusqu’à tes oreilles, par ta beauté inouïe, je te conjure de les écouter ; elles n’ont d’autre objet que de te supplier de ne pas me refuser ta faveur et ton appui, maintenant que j’en ai si grand besoin. Je vais m’enfoncer et me précipiter dans l’abîme qui s’offre devant moi, seulement pour que le monde apprenne que, si tu me favorises, il n’y a point d’entreprise impossible que je n’affronte et ne mette à fin. »

En disant cela, il s’approcha de l’ouverture, et vit qu’il était impossible de s’y faire descendre et même d’y aborder, à moins que de s’ouvrir par force un passage. Il mit donc l’épée à la main, et commença de couper et d’abattre des branches à travers les broussailles qui cachaient la bouche de la caverne. Au bruit que faisaient ses coups, il en sortit une multitude de corbeaux et de corneilles, si nombreux, si pressés, et telle-