Page:Cervantes - L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche, traduction Viardot, 1837, tome 2.djvu/527

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dans la rue le secret de ses fontaines, elle ne put se contenir, ni Altisidore non plus. Toutes deux, pleines de colère et altérées de vengeance, se précipitèrent brusquement dans la chambre de Don Quichotte, où elles le criblèrent de blessures d’ongles, et fustigèrent la duègne, comme on l’a raconté : tant les outrages qui s’adressent directement à la beauté et à l’orgueil des femmes éveillent en elles la fureur, et allument dans leur cœur le désir de la vengeance ! La duchesse conta au duc ce qui s’était passé, ce dont il s’amusa beaucoup ; puis, persistant dans l’intention de se divertir et de prendre ses ébats à l’occasion de Don Quichotte, elle dépêcha le page qui avait représenté Dulcinée dans la cérémonie de son désenchantement (chose que Sancho Panza oubliait de reste au milieu des occupations de son gouvernement), à Thérèse Panza, femme de celui-ci, avec la lettre du mari et une autre de sa propre main, ainsi qu’un grand collier de corail en présent.

Or, l’histoire dit que le page était fort éveillé, fort égrillard ; et, dans le désir de plaire à ses maîtres, il partit de bon cœur pour le village de Sancho. Quand il fut près d’y entrer, il vit une quantité de femmes qui