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Page:Châteaubriant, Alphonse de - Monsieur des Lourdines, 1912.djvu/147

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Les deux servantes avaient bien constaté que leur maître n’était plus le même depuis quelque temps, mais elles n’apportèrent aucun fait précis, sauf Estelle qui, dans ces derniers jours, l’avait entendu parler tout seul dans sa chambre.

« Et qu’est-ce qu’il dit ?… tu as bien écouté, enfin !… tu as bien fait d’écouter, allons !… qu’est-ce qu’il dit comme cela, tout seul ?

– Ah ! madame notre maîtresse, il dit, il dit… je ne sais point ! »

Quant à Frédéric, il se gratta la tête. Il était d’avis, lui, que monsieur devait être bien malade… et il narra la scène de la nuit, dépeignit la figure blême de son maître quand il était venu le faire lever pour atteler, dès trois heures. « J’ai vu dans la retraite de Russie, dit-il, des hommes couchés dans la neige… eh bien, madame notre maîtresse, ils n’étaient pas plus blancs que lui ! »

Elle eut un geste d’effroi.

« Mon Dieu ! Mon Dieu ! Et en chemin, Frédéric, que vous a-t-il dit ?

– Rien, madame, lui qui est très causant