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ÉLÉGIE XX.


(DANS LE GOÛT ANCIEN.)


PLEUREZ, doux Alcyons ! ô vous, oiseaux sacrés,
Oiseaux chers à Thétis ; doux Alcyons, pleurez !

Elle a vécu, Myrto, la jeune Tarentine !
Un vaisseau la portait aux bords de Camarine :
Là l’hymen, les chansons, les flûtes, lentement
Devaient la reconduire au seuil de son amant.
Une clef vigilante a, pour cette journée,
Sous le cèdre enfermé sa robe d’hyménée,
Et l’or dont au festin ses bras seront parés,
Et pour ses blonds cheveux les parfums préparés.
Mais, seule sur la proue invoquant les étoiles,
Le vent impétueux qui soufflait dans ses voiles
L’enveloppe : étonnée et loin des matelots,
Elle tombe, elle crie, elle est au sein des flots.

Elle est au sein des flots, la jeune Tarentine !
Son beau corps a roulé sous la vague marine.
Thétis, les yeux en pleurs, dans le creux d’un rocher,
Aux monstres dévorans eut soin de le cacher.