Page:Chénier - Œuvres complètes, éd. Latouche, 1819.djvu/240

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ODE XI.


LA JEUNE CAPTIVE.


L’Épi naissant mûrit de la faux respecté ;
Sans crainte du pressoir, le pampre tout l’été
Boit les doux présens de l’aurore ;
Et moi, comme lui belle, et jeune comme lui,
Quoique l’heure présente ait de trouble et d’ennui,
Je ne veux point mourir encore.

Qu’un stoïque aux yeux secs vole embrasser la mort,
Moi je pleure et j’espère ; au noir souffle du Nord
Je plie et relève ma tête.
S’il est des jours amers, il en est de si doux !
Hélas ! quel miel jamais n’a laissé de dégoûts ?
Quelle mer n’a point de tempête ?

L’illusion féconde habite dans mon sein.
D’une prison sur moi les murs pèsent en vain,
J’ai les ailes de l’espérance :
Échappée aux réseaux de l’oiseleur Cruel,
Plus vive, plus heureuse, aux campagnes du ciel
Philomèle chante et s’élance.