Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 1.djvu/175

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et les bergers disaient, me voyant triomphant :
« Ô que de biens perdus ! Ô trop heureux enfant ! »


XXIV[1]


 Toujours ce souvenir m’attendrit et me touche,
Quand lui-même, appliquant la flûte sur ma bouche,
Riant et m’asseyant sur lui, près de son cœur,
M’appelait son rival et déjà son vainqueur,
Il façonnait ma lèvre inhabile et peu sûre
À souffler une haleine harmonieuse et pure ;
Et ses savantes mains prenaient mes jeunes doigts,
Les levaient, les baissaient, recommençaient vingt fois
Leur enseignant ainsi, quoique faibles encore,
À fermer tour à tour les trous du buis sonore.


XXV[2]


Traduction de Platon


Là reposait l’Amour, et sur sa joue en fleur
D’une pomme brillante éclatait la couleur.
Je vis, dès que j’entrai sous cet épais bocage,
Son arc et son carquois suspendus au feuillage.
Sur des monceaux de rose, au calice embaumé
Il dormait. Un souris sur sa bouche formé
L’entr’ouvrait mollement ; et de jeunes abeilles
Venaient cueillir le miel de ses lèvres vermeilles.

  1. Édition 1819.
  2. Édition 1819.