Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 2.djvu/161

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il se lève, il se traîne loin de cet arbre funeste, et plus il s’en éloigne, plus il sent se ranimer son cœur


Et renaître en son flanc la force et la vigueur.


Je veux, dans un tableau pathétique et sombre, mettre un homme dans une circonstance où il puisse traduire Job : pereat dies in qua[1]… et la sentence grecque : le meilleur était de ne pas naître, ensuite de mourir bientôt.


Je veux, dans un même morceau, confondre et imiter cet endroit d’Homère où Priam demande à Hélène le nom des héros de l’armée[2], et la divine scène d’Eschyle dans les Sept chefs où un messager apprend à Étéocle les noms des Chefs et les devises de leurs bouchers qu’Étéocle rétorque toujours contre eux. Cette scène est au-dessus de l’éloge. Il faut presque la traduire.


Un rôle assez important du côté des Américains sera une prophétesse comme il y en eut toujours chez les peuples barbares, laquelle attachée aux Pizarre, comme Cassandre à Agamemnon, chantera et prédira l’assassinat actuel de François Pizarre. C’est là que j’imiterai cette admirable et unique scène de Cassandre dans l’Agamemmon d’Eschyle. Plût à Dieu que je pusse trouver quelque occasion d’imiter aussi cette tragédie des Perses !


Chez les anciens, des hommes attirés dans un palais qui cachait un piège, reçus devant l’autel de Jupiter hospitalier, au moment où ils seraient attaqués dans la nuit, comme les gendres de Danaüs, s’élanceraient aux pieds de Jupiter

  1. Ch. iii, v. 3.
  2. Illiad., III, v. 161 et suiv.