Page:Chénier - Œuvres poétiques, édition Moland, 1889, volume 2.djvu/267

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ODES


I[1]


 
       La Déesse aux cent voix bruyantes
À du séjour sacré des âmes innocentes
       Percé les ténébreux chemins.
Là, du jeune La Barre un bois triste et nocturne
Voit à pas lents errer loin de tous les humains
       L’ombre superbe et taciturne.
       La Nymphe ailée auprès de lui
Descend : « Viens, lui dit-elle, il est temps que ta haine
       Pardonne à la race humaine.
       Ta patrie est juste aujourd’hui. »


II[2]


J’ai vu sur d’autres yeux, qu’amour faisait sourire,
Ses doux regards s’attendrir et pleurer,
Et du miel le plus doux que sa bouche respire
Un autre bouche s’enivrer.

Et quand sur mon visage, inquiet, tourmenté,
Une sueur involontaire
Exprimait le dépit de mon cœur agité,
Un coup d’œil caressant, furtivement jeté,
Tempérait dans mon sein cette souffrance amère.

  1. Édition d G. de Chénier.
  2. Édition 1819.