— Oh ! un sale métier, vous savez : il faut s’éreinter avec des hommes qu’on ne connaît pas. Si on n’y gagnait pas un peu d’argent, je crois que j’aimerais mieux être femme de maison.
Lucie Thirache rougit, et, dans une peur honteuse, elle se mit à inventer une histoire très compliquée : un jeune homme de Saint-Quentin, dont elle se rappelait le nom par hasard, y jouait un grand rôle.
L’autre femme parut s’émouvoir fort et, à son tour, elle s’épanchait en confidences : elle était allée à Dunkerque avec un chanteur qui l’avait mise enceinte, lui promettant le mariage. Toujours, dans ses récits, cet homme devenait plus méchant, jusque le trait dernier, où, ayant volontairement attrapé le mal pour le donner à sa maîtresse, il avait laissé la malheureuse seule, à Douai, sans argent, déjà malade.
Une grande amitié unit les deux filles ; elles se contaient leurs petites affaires, se soignaient tour à tour. La voisine de Lucie s’appelait Dosia. Dès le premier jour elle apparut une femme pratique, apprit à sa nouvelle camarade des trucs pour obtenir des suppléments. Elle savait feindre une faiblesse, engageant le docteur à ordonner des mets fortifiants. Lucie Thirache voulut profiter de ces subterfuges qui lui paraissaient admirables, d’une femme tout à fait supérieure. Et, la nuit, quand les douleurs au crâne, l’in-