Page:Chair molle.djvu/177

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une carnassière étalée sur le guéridon et, sur le parquet, de grosses bottes embouées. Effarée, elle s’avança vers le lit, et son étonnement alla au paroxysme en découvrant la blafarde figure de Georges, le jeune homme de la partie de campagne. Lui aussitôt s’écria :

— Tiens ? Je croyais que c’était Nina.

— Où est-elle ? demanda brièvement la chanteuse.

L’homme avait lâché son journal et, la pipe à la main, il la fixait de ses yeux bêtes, bordés de rouge.

— Je l’ai envoyée chercher du rhum au café à côté, vous savez, au coin de la rue.

— C’est bon ; je vais la rejoindre, grommela Dosia.

Elle fit claquer la porte avec bruit, descendit l’escalier et se heurta dans la rue à Lucie qui revenait.

— Tiens ! te v’là ? dit celle-ci, essayant tendre les mains sous ses paquets.

Mais l’autre, sans répondre à ce geste, clama furieuse :

— Tu es folle, n’est-ce pas ? C’est idiot ce que tu fais là. Comment, tu as un amant qui te donne tout ce qui te faut et tu lui fais la queue comme ça, avec le premier imbécile venu ! Ben vrai, si on m’avait dit ! Tu devrais pourtant faire un peu attention à toi, après tout ce qui t’est arrivé !