Page:Chair molle.djvu/99

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en prie demandez qu’on me garde. Oh ! si vous saviez comme j’ai peur. Je ne veux pas aller à l’hospice, je ne veux pas… et la phrase s’acheva dans des sanglots.

Les filles très émues pleuraient. La Donard revint ; d’un geste elle renvoya les femmes, et s’étant penchée à la rampe, elle se retourna.

— Allons vite, il faut filer. On vient te chercher.

— Oh non ! ce n’est pas vrai, dites ? demanda encore Lucie parmi ses pleurs.

Un agent parut sur la dernière marche, et derrière lui, deux hommes en tabliers blancs s’avancèrent vers la fille. À leur vue elle se recula. Une colère, brutalement, l’envahit contre Madame qui l’abandonnait. Ses muscles se tendirent, elle prit son élan pour s’élancer sur la patronne, hurlant :

— Canaille, va !

Les infirmiers l’avaient empoignée, ils la retenaient dans leurs fortes mains. Lucie, féroce, rageait, crachant à la Denard, qui haussait les épaules au fond du couloir :

— Tu me le paieras. C’est de ta faute, grosse vache ! Tu recevais toutes sortes de crapules dans ton ignoble boutique. Oui, c’est de ta faute ! je te la ferai fermer ta sale boîte : Tu y as reçu des enfants qui n’avaient pas dix-sept ans ! Attends un peu que je sois guérie, tu en verras