Page:Chalandon - Essai sur la vie et les œuvres de P. de Ronsard, 1875.djvu/232

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main, afin de nous transporter dans une sphère idéale; nous placer face à face avec Dieu et mé- diter, dans le recueillement, sur nos destinées? Alors la supérioiilé du poëte disparaît. Comme le Faust, de Gœthe, entraîné vers les mères ^ dans le vide absolu, ne trouvant pas même une place sur le sol pour y poser le pied ; il hésite, il chancelle, sa foi n'est pas tellement vive qu'il puisse supporter la vue de Dieu sans voiles ; il est complètement dé- |)assé dans ses sphères, par un poëte moins raffiné, peut-être, mais d'un souffle })lus large et d'une ar- deur plus pure: j'ai nommé Lamartine.

Le sentiment religieux que Victor Hugo a pu ex- ploiter comme une richesse poétique, est pour La- martine un besoin ; c'est comme l'air qu'il respire. Sa théologie peut n'être pas toujours irréprochable, mais il a besoin du surnaturel ; il faut qu'il s'y j)longe pour que sa poésie atteigne son expression la plus complète.

Même quand la Muse de Victor Hugo touche aux plus hauts sommets du lyrisme, je sens toujours le poëte qui s'occupe de lui et de son art, qui cherche la rime la plus savante et l'effel le plus saisissant.

Il faut qu'un acteur soit bien habile pour qu'il parvienne à me faire oublier (jue les sentiments <]u'il exprime sont leinlsel quil ne ressent aucune