Page:Chalandon - Essai sur la vie et les œuvres de P. de Ronsard, 1875.djvu/239

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sentiment de l'infini. On a étendu sur le monde une teinte de tristesse inquiète qui, fréquemment, a dégénéré en un panthéisme vague et indéterminé. Nos auteurs contemporains, incrédules ou d'une foi chancelante, se voyant en face de l'univers dans sa force et sa puissance, et, pour ainsi dire, écrasés, abîmés sous son immensité, se sont relevés fièrement et ont essayé de lui arracher son secret. L'anliquilé remarquant la vie qui circulait partout, l'avait idéalisée et peuplait l'espace de Faunes, de Dryades, de Divinités qui personnifiaient le principe vitiLU Les modernes ont pris cette vitalité pour la source même de la vie : dans leurs vers, la pierre s'anime, le roc s'émeut, le chêne pense, le gémissement de la brise et le murmure des flots sont des voix qui vous par- lent. Lamartine, le plus religieux de tous, n'a pas échappé à cette influence; il s'écrie, dans un ma- gnifique langage :

Objets inanimés, avez-vous donc une àme, Qui s'attache à la nôtre et la force d'aimer?

Toute la pièce du Lac n'est, en quelque sorte, qu'un superbe développement de cette idée.

Chez le poëte qui nous occupe particulièrement, chez Victor Hugo, il y a quelque chose de plus : il a volontairement confondu ce que j'ai appelé le