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Page:Challamel - Souvenirs d’un hugolâtre.djvu/16

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Il confondait la République avec l’Empire, Hoche avec Napoléon, la liberté avec la gloire ; il parlait comme une chanson de Béranger, lui qui m’avait appris le Soldat, t’en souviens-tu ! d’Émile Debraux, auteur de la Colonne, du Prince Eugène, de Marengo, de Mont-Saint-Jean, et d’autres rimes qui lui avaient valu « les persécutions du pouvoir » pendant la Restauration.

On vendait dans les rues, par milliers, des cocardes nationales.

Mon oncle et moi, nous en achetâmes avec enthousiasme, pour les attacher à notre vêtement, sur le cœur, en « bons patriotes ».

Comme nous rentrions à la maison, je rencontrai un vieil ami de mon père, un royaliste désolé, qui, apercevant ma cocarde tricolore, me dit moitié avec amertume, moitié avec colère :

« Tu portes là une jolie chose, va ! Avant six mois, le drapeau blanc et la cocarde blanche auront reparu. »

Le vieillard qui parlait ainsi était M. Delvincourt, ancien doyen de la Faculté de droit de Paris, qui mourut en 1831, « fidèle à son Dieu et à son roi », mais qui n’avait pas vécu en trop bonne intelligence avec les étudiants.

Notons, à ce propos, que, pendant plus de vingt années, une bonne dame de nos connaissances, non moins légitimiste que M. Delvincourt, nous