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Page:Challamel - Souvenirs d’un hugolâtre.djvu/176

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nous connaissions l’indigence du Second Théâtre-Français, avant la Lucrèce de Ponsard.

On en racontait de belles sur les expédients de l’administration, sur l’état délabré de la caisse !

Pour faire croire que le poêle du foyer public était allumé, le feutier, disait-on, s’avisa un soir d’y placer une bougie. Notre ami Bignon joua, un dimanche, le rôle de Gilbert dans Marie Tudor, et, comme il n’y avait pas, au magasin, de souliers à la poulaine qu’il pût chausser, nous lui en fabriquâmes avec des cornets de papier noirci d’encre. Le vieux Rosambeau, acteur d’un certain talent, presque aussi célèbre que Frédérick-Lemaître pour ses mots à citer, était de plus renommé pour ses inventions en fait de costumes ; il s’accoutrait de son mieux avec des pièces et des morceaux ; il était de force à teindre une jambe de caleçon en rouge, l’autre en noir, pour jouer un rôle moyen âge.

Afin d’obtenir une quasi-recette, les dimanches, Lireux imaginait soudainement de représenter quelque vieille tragédie, de ressusciter une pièce oubliée.

« Messieurs, déclarait-il un vendredi, par exemple, on jouera dimanche Abufar ou la Famille arabe (de Ducis). »

Quelques familles bourgeoises du quartier venaient voir la représentation d’Abufar ; et