Page:Challamel - Souvenirs d’un hugolâtre.djvu/44

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semblable à celui d’Antony, une « bonne lame de Tolède », avec les « semaines » qu’on me donnait.

Il faut rappeler, ici, que le feutre à retroussis sur le côté distinguait tout de suite un artiste ou un poète d’un bourgeois, et qu’il produisait le plus bel effet du monde au parterre des théâtres.

Avec cela, quelque juron haut en couleur vous plaçait presque au niveau des maîtres en herbe ou des génies incompris. On vous regardait autant qu’on regardait l’actrice en renom.

Chose remarquable, le chapeau ne fut pas seulement un signe de ralliement artistique ou littéraire ; il eut aussi sa signification politique, lorsque parurent les couvre-chefs gris dont se coiffèrent les républicains, pourvus également de gilets à la Robespierre, et se plaisant à évoquer les souvenirs de 93.

Pour le coup, les bourgeois s’indignèrent, et le chapeau gris fit sensation.

Il était porté par une foule de « bousingots », affichant leurs opinions démocratiques, métamorphosant certains estaminets en clubs, bravant avec crânerie les sergents de ville, déjà fort mal vus par la jeunesse turbulente.

En maintes occasions, les partisans de la royauté citoyenne coururent sus aux chapeaux gris ; dans les jours d’émotion, ils en défoncèrent