Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/148

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chrétien, et dont la fraîcheur se fit pourtant sentir précisément dans l’âme des adversaires du christianisme : aussi Fardent artiste ne se posa-t-il point, dès l’abord, la question des races. Les plus sages de son temps ne déclaraient-ils pas qu’il n’en existait pas de plus ou moins nobles (Humboldt) ? Mais de ce fait, non plus que de cet autre que, plus tard, ayant puisé dans de sérieuses études la conviction d’une valeur différente des races, et de la supériorité essentielle, qualitative, du tronc indo-européen, Wagner garda son cœur grand ouvert à l’humanité dans son ensemble, et ne voulut d’autre gloire pour sa patrie allemande, que « d’anoblir et de sauver le monde », au lieu de le dominer, de ces faits, disais-je, on ne saurait conclure vraiment, chez lui, au radicalisme cosmopolite.

Jamais Wagner, même à l’époque révolutionnaire, ne s’est laissé séduire par l’internationalisme. Il est vrai que, dans l’Œuvre d’art de l’avenir, il signale « deux moments principaux dans l’évolution humaine : celui du nationalisme local, et celui de l’universalisme supranational ». Mais c’est avec une sympathie très significative que, dans ce même écrit, il salue le premier de ces deux moments. Ce qu’il reproche même à nos États modernes, c’est de n’avoir pas de base à la fois nationale et ethnique, mais de représenter bien plutôt « les groupements d’hommes les moins conformes à la nature…, résultats d’un arbitraire tout extérieur, d’intérêts dynastiques, par exemple, propres aux familles régnantes». Et si, un moment égaré par les fausses doctrines des hommes qui, alors, donnaient le la de la politique, il s’est décidément trompé en admettant que le développement national et ethnique était arrivé à son terme, on peut affirmer que non seulement, en 1849, il n’avait pas encore approfondi théo-