Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/233

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas non plus dans une série de réformes et d’innovations techniques. Certes, l’œuvre de Wagner est riche en enseignement technique, et pour le musicien, et pour le poète, et pour le dramaturge. Mais, comme le dit encore Wagner, « il ne faut parler de technique qu’entre gens du métier : le laïc ne doit pas avoir à s’en occuper. » La chasse aux motifs et aux réminiscences, la recherche, sous tous les accords, d’intentions subtiles et profondes : ce sont à coup sûr des passe-temps inoffensifs, et je ne nie pas qu’ils puissent à l’occasion être utiles ; mais ils n’ont rien à voir avec une doctrine artistique. Sans compter qu’il est toujours assez dangereux de vouloir déduire d’une œuvre d’art des leçons de technique trop absolues. Wagner lui-même l’entendait ainsi : qu’on se rappelle, par exemple, avec quelle réserve il a touché aux questions de technique toutes les fois qu’il a eu à parler de Beethoven, son seul vrai maître ! Et ne voit-on pas combien de dommage ont causé à l’art des temps modernes les œuvres sublimes de l’art grec, simplement parce que nous avons voulu en inférer des leçons, c’est-à-dire des lois et des règles à notre usage, tandis qu’il n’y avait à en inférer qu’une seule leçon : et c’est, à savoir, que les hommes qui ont produit de tels ouvrages devaient se faire du monde, une autre conception que la nôtre, et vivre d’une autre vie. Les Grecs étaient un peuple d’artistes, et nous ne le sommes point : voilà l’unique enseignement qui résulte pour nous de leurs œuvres.

La doctrine artistique de Richard Wagner, ce sont les principes généraux que, durant toute la seconde période de sa vie, il a obstinément, infatigablement, invariablement soutenus, par la parole et par l’action : c’est l’ensemble de ses idées sur la destination de l’art.