Page:Chamberlain - Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, 1900.djvu/275

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décisive. Sa famille, de Dresde s’était transportée à Leipzig ; là l’adolescent entendit, pour la première fois, de la musique symphonique : « Pendant que je terminais ma grande tragédie » écrit Wagner « j’appris à connaître, pour la première fois, dans les concerts du Gewandhaus de Leipzig, la musique de Beethoven. Le choc que j’en reçus fut puissant et profond. Je me familiarisai aussi quelque peu avec Mozart, surtout par son Requiem. La musique d’Egmont, de Beethoven, m’enflamma de telle sorte que je n’eusse voulu pour rien au monde lancer ma tragédie, terminée pourtant, avant de l’avoir pourvue d’une musique semblable. Sans prendre le temps de réfléchir, je me mis en tête d’écrire cette musique si nécessaire ; mais je jugeai à propos, toutefois, d’éclaircir d’abord mes idées sur quelques règles essentielles de la basse fondamentale. Pour le faire en toute hâte, j’empruntai pour huit jours la Méthode de basse fondamentale de Logier, et me mis à l’étudier avec le plus grand zèle. Mais cette étude ne produisit pas l’effet rapide que j’en attendais ; les difficultés que j’y trouvais ne firent, d’ailleurs, que m’éperonner et me fascinèrent ; je résolus de devenir musicien ». Cet événement nous en apprend long sur les aptitudes du maître. De même que le vif intérêt que le jeune Wagner prenait au langage ne provenait point d’une propension analytique et philologique, ainsi la musique ne l’attira pas particulièrement tant qu’il n’y vit que le jeu de belles formes, tant que ce ne fut pas comme poète qu’il y chercha un nouveau moyen d’expression ; et s’il voulut se rendre maître de ce moyen, ce ne fut qu’après avoir entendu une musique passionnément dramatique, répondant à son propre besoin de dire davantage qu’il ne l’avait pu avec des mots seulement. Ce fut le poète qui devint musicien. Encore ici,