Page:Chambrier - Au delà (Fischbacher 1886).djvu/43

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avec tant de ponctualité l’argent mignon que lui rapportaient ses petits succès poétiques et les vers publiés çà et là dans divers recueils ! Tout s’expliqua lorsqu’on trouva son « livre de pauvres » tenu par Doit et Avoir, indiquant d’un côté les recettes de la poésie et de l’autre les dépenses de la charité. La dernière visite qu’elle ait faite, quatre jours avant de succomber au mal qui l’a emportée, fut une visite à une pauvre femme malade ; on ne l’apprit qu’après sa mort. Ses parents même ont ignoré de son vivant tel trait de dévouement qui, si je le racontais, m’autoriserait à employer le mot d’héroïsme et où elle trouvait des jouissances plus profondes que dans les beaux alexandrins aux rimes sonores. Pour les belles âmes, le dévouement est de la poésie en action.

Les pauvres, les malades, les déshérités entraient, si j’ose dire ainsi dans ses combinaisons d’avenir. Elle aimait à se représenter — étrange et rare caprice chez une jeune fille ! — qu’elle ne se marierait pas ; d’avance elle