Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/17

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volution, où, dans des discours accompagnés de gravures, les événemens remarquables sont éloquemment retracés. Chamfort en donna treize livraisons, contenant chacune deux tableaux. L’ouvrage fut continué jusqu’à la vingt-cinquième livraison, par M. Ginguené. Plus d’un orateur, dans l’assemblée constituante, mit à contribution son talent et son patriotisme. Il avait composé pour Mirabeau le Discours contre les Académies. Il ne paraissait aux assemblées populaires que dans les momens où il y avait du danger à s’y montrer. Habitué à parler en homme libre, il ne pouvait se persuader qu’il fût dangereux de s’expliquer franchement sur les hommes et les choses. Il n’avait pas attendu la révolution pour le faire : ni Marat, ni Robespierre, ni aucun de ceux qui commençaient à peser sur la France, n’étaient exempts de ses saillies. Indigné de la prostitution qu’ils avaient faite du doux nom de fraternité, il traduisait cette inscription tracée sur tous les murs, Fraternité ou la mort, par celle-ci : Sois mon frère ou je te tue. Il disait : La fraternité de ces gens-là est celle de Caïn et d’Abel. On lui faisait observer qu’il avait répété plusieurs fois ce mot : « Vous avez raison, répondit-il, j’aurais dû dire, pour varier, d’Étéocle et de Polynice. » Ses sarcasmes étaient autant de crimes qui étaient notés, dénoncés, et dont on se promettait dès lors de lui faire porter la peine. Cependant, comme c’était sous le masque du patriotisme et au nom de la liberté, qu’à cette