Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t1.djvu/257

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

DE CHAMFORT. 3.33

riens sont véridiques, si les beautés dont ils parlent ont en effet mérité ces soupçons , au moins est-il certain que, loin de leur patrie, entre des adversaires si formidables, elles n'avaient point à craindre le reproche qu'on leur fit depuis en Europe, celui de préférer les chevaliers des tour- nois aux chevaliers des batailles: méprise qui sur- prendrait dans un sexe si bon juge de la gloire. Mais qui peut croire à cette méprise? et de quel poids doivent être ces vains reproches, et ces plaintes de mécontens, si on leur oppose l'hom- mage rendu aux femmes par un guerrier tel que le grand Diiguesclin ? Prisonnier des Anglais , et amené devant le fameux Prince-Noir son vain- queur , le prince le laisse maître de fixer le prix de sa rançon. Le prisonnier croit se devoir à lui- même l'honneur de la porter à une somme im- mense. Un mouvement involontaire trahit la sur- prise du prince. « Je suis pauvre , continue le » chevalier; mais apprenez qu'il n'est point de » femme en France , qui refuse de filer une année » entière pour la rançon de Duguesclin. » Telle était alors la galanterie française ; et cependant , disait-on, elle était déjà bien tombée. La chevale- rie même dégénérait de jour en jour; pour la va- leur, non , ce n'est point ainsi que dégénèrent des chevaliers français; pour Tamour, oui, si l'in- fidèle dégénère. Ils n'étaient plus , ces temps où des héros scrupuleux , timorés , distinguaient l'a-? m.our faux, l'amour vrai: l'amour faux, péché

�� �