Aller au contenu

Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t5.djvu/314

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

3o8 OEUVRF.S

chambre; car, sans être malade , je suis excédé, anéanti , et j'ai grand besoin de lepos. Voilà prés de huit jours qu'il m'a été impossible de me dé- livrer d'une fantaisie de poète, vraiment poétique, au moins par son acharnement. Le jour, la nuit , le repas même, tout s'en est ressenti: je ne croyais pas être si jeune. Rien , absolument rien , n'a pu faire lâcher prise à cette lubie. C'est être mordu d'un chien enragé. Le chien n'était pas gros, mais c'est un çhien-loup, ou plutôt un chien- hon, un mélange d'horrible et de ridicule, de rai- son et de folie; mais où la raison ordonnait à la folie de paraître dominante. J'irai vous faire ma cour un de ces matins, et vous présenter à votre lever mon redoutable petit bichon, .respèreque, malgré ses dents , et non pas malgré lui, il pourra vous amuser. Je ne me servirais pas de lui pour faire ma paix avec vous ; car je ne la ferais jamais avec moi-même , si je n'avais pas , à vingt reprises , écarté , repoussé, cette persévérante folie , souve- raine maîtresse de mon imagination. Si je vous en demandais j)ardon , ce serait vous demander par- d(jn d'avoir eu quelques accès de fièvre. Fièvre, ioit : la comparaison est juste; et il ne me fallait rien moins qu'une maladie pour m'empécher do vous envoyer bien vite ce que je vous ai promis. Il est vrai de dire que je me suis bien mis quatre à cinq fois au livre de M. de Saint-Pierre, dont j'avais n)ille choses à dire , hautes préparées dans ma lêU; : et il n'est pas moins vrai que je nai j)u

�� �