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dites il est impossible de le connaître ^ ne doive toute son impénétrabilité au défaut presque absolu de caractère. N'allez pas me citer d'exceptions; car les exceptions , qu'encore faudrait-il débattre , prouvent la règle, bien loin de la détruire. Je dis qu'encore faudrait-il dél)attre les exceptions ; et en effet, dans notre sexe, on n'a généralement pas une certaine force de tète, sans quelque force de caractère; dans celui-là ^ voyez comme l'analogie est fautive ! Je lisais hier, dans votre recueil philo- sophique, un morceau sur le bonheur de madame duChâtelet, que je ne connaissais pas, et qui vaut d'être connu. Il y a, dans ce morceau, des choses charmantes sur l'amour , et notamment deux pages sur l'immutabilité de son âme en amour, qui séduiraient à coup sur quiconque ne connaî- trait pas son histoire.Yous la savez mieux que moi; vous savez qu'elle n'était pas même tendre , et qu'elle fut très-galante. Qu'était-ce donc que cette femme, qui avait infiniment plus de force de tète, et même de véritable esprit , que tout le reste de son sexe ensemble ; et qui traçait une théorie où l'âme seule semble avoir dessiné cette phrase dé- licieuse: « Il faut employer toutes les facultés de » son âme à jouir de ce bonheur.... Il faut quitter » la vie quand on le perd, et être bien sûr que les » années de Nestor ne sont rien au prix d'un » quart d'heure d'une telle jouissance... Il est juste » qu'un tel bonheur soit rare ; s'il était commun , » il vaudrait mieux être homme qu'être Dieu ,
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