Page:Champfleury - Richard Wagner, 1860.djvu/5

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qui me commande enfin les lignes qui vont suivre frémissantes, laissant à peine à ma plume le temps de les tracer.


Richard Wagner ! Je retrouve ce nom logé dans un coin de ma mémoire par un critique académique, M. Fétis père, de Bruxelles en Brabant, Van Fétis, un rat de bibliothèque, un commentateur sans portée, un biographe à coups de ciseaux, qui a écrit quelque part que Wagner « était le Courbet de la musique. »

Comme vous le pensez, c’était dans la pensée du Flamand une insulte qui me donna longtemps à réfléchir. Que pouvait être un Courbet en musique ? C’est ce que je cherchai péniblement. Le grand peintre, assailli et insulté depuis si longtemps par les gandins des petits journaux, est un artiste remarquable avant tout par la puissance de son pinceau.

On peut découper dans chacune de ses toiles un morceau, c’est de la peinture ; mais comme les Français se connaissent médiocrement en peinture et qu’ils s’attachent avant tout au sujet, à l’esprit et au joli, Courbet ne pouvait être compris.

En même temps, l’accusation de réalisme venait se joindre aux efforts des jaloux pour empêcher le développement du maître, et il en était de ce mot de réalisme comme du titre de Musique de l’avenir, dont on a affublé ironiquement Richard Wagner.


Je parlerai plus tard du titre de Musique de l’avenir, dont les adversaires de Wagner se sont servis longtemps comme d’une massue, croyant l’accabler ; mais les massues des journalistes ne sont que des massues des Funambules, en toile peinte avec du foin dedans.