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THÔOUT, THOTH DEUX FOIS GRAND,

LE SECOND HERMÈS.
Planche 30

Le premier Thoth, Hermès trismégiste[1], l’Hermès céleste ou l’intelligence divine personnifiée, le seul des êtres divins qui, dès l’origine des choses, comprit l’essence du dieu suprême, avait, selon les mythes sacrés de l’Égypte, consigné ces hautes connaissances dans des livres qui restèrent inconnus jusqu’à ce que le Démiurge eut créé les ames, et par suite l’univers matériel ainsi que la race humaine. Le premier Hermès avait écrit ces livres en langue et en écriture divines ou sacrées[2] ; mais après le Cataclysme, lorsque le monde physique fut réorganisé et reçut une nouvelle existence, le créateur prenant pitié des hommes qui vivaient sans règle et sans lois, voulut, en leur donnant l’intelligence et une direction salutaire, leur tracer la voie qui devait les ramener dans son sein dont ils étaient émanés. Ce fut alors que se manifestèrent sur la terre Isis et Osiris, dont la mission spéciale fut de civiliser l’espèce humaine. Ces deux époux avaient pour associé et pour conseiller fidèle, Thoth, nommé aussi Thoyth par les Grecs, le second Hermès, qui n’était toutefois qu’une incarnation du premier, ou l’Hermès céleste manifesté sur la terre.

Tout ce que tentèrent Isis et Osiris pour tirer les humains de l’état sauvage, fut ou suggéré ou approuvé par Thoth, et c’est à ce second Hermès que les Égyptiens se croyaient redevables de toutes leurs institutions sociales. Ce dieu passait pour fils d’Agathodæmon[3]. Les hommes étaient encore réduits, comme les animaux, à ne manifester leurs sensations que par des cris confus et sans liaison ; Thoth leur apprit une langue articulée, et imposant des noms à tous les objets[4], il donna à chaque individu le moyen de communiquer ses pensées et de s’approprier celles des autres. Il fit plus : il enseigna à les fixer d’une manière durable, en inventant l’art inappréciable de l’écriture ; il organisa l’état social, établit la religion, et régla les cérémonies du culte ; il fit connaître aux hommes l’astronomie et la science des nombres, la géométrie, l’usage des poids, des mesures et de la monnaie. Non content de satisfaire à tous les besoins de la société humaine par ces importantes et utiles créations, le second Hermès s’occupa aussi de tout ce qui pouvait contribuer à embellir la vie : il inventa la musique, fabriqua la lyre, à laquelle il ne donna que trois cordes, et institua les exercices gymnas-

  1. Voyez les planches 15, 15 (A), 15 (B), et leur explication.
  2. Manéthon, Chronogr. du Syncelle, page 40.
  3. Idem, ibidem.
  4. Diodore de Sicile, liv. I, page 14.