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ANOUKÉ.

(anucis, istia, estia, vesta.)
Planche 19

Les savants qui, jusques ici, se sont occupés de la mythologie des Égyptiens, ont cru que ce peuple ne connut jamais de divinité dont les fonctions eussent quelque analogie avec l’Estia des Grecs, la Vesta des Romains ; ils appuyaient leur opinion sur l’autorité d’Hérodote, qui a dit, en effet, que les noms de Héra et d’Istia furent inconnus aux Égyptiens[1]. Mais le père de l’histoire ne parle que des noms seulement, sans prétendre ni même insinuer que les Égyptiens n’adorassent point de déesse dont les attributions eussent certains rapports avec celles de Héra et d’Istia dans l’Olympe grec.

L’existence, dans l’ancienne religion égyptienne, d’une déesse que les Grecs, à tort ou à raison, assimilèrent à leur Estia, est d’ailleurs prouvée par le témoignage formel de Diodore de Sicile[2], qui nomme Estia parmi les divinités de l’Égypte.

L’importante inscription grecque découverte aux Cataractes, lève d’ailleurs toute incertitude à cet égard, car ce texte curieux nous apprend non-seulement que la déesse Estia était adorée dans le temple égyptien de l’île sainte de Sètès, mais il nous fait connaître encore le nom égyptien de cette déesse ; la dédicace porte en effet ΑΝΟΥΚΕΙ ΤΗΙ ΚΑΙ ΕΣΤΙΑΙ, À Anoukis, qui est aussi Estia. Cette précieuse synonymie a suffi pour conduire à distinguer sur les monuments égyptiens, les images de la déesse Anouké ou Anouki, personnage mythique dans lequel les Grecs du temps d’Évergète II, croyaient retrouver Estia, une de leurs divinités nationales.

Dans l’inscription des Cataractes, Anouké est immédiatement nommée après le Démiurge Ammon-Cnouphis et après Saté, le Jupiter et la Junon des Égyptiens ; Osiris, Cronos et Hermès, ne sont mentionnés

  1. Hérod., liv. II, §. 50.
  2. Diod. de Sicile, liv. I, §. 13.