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ont usée à un tel point que personne n’en est plus la dupe. Un journaliste est-il à court de phrases pour combler la membrure de sa feuille ; aussi-tôt il fait intervenir un soporifique correspondant, qui vous le gratifie d’une lettre d’une mortelle page & quelquefois plus, quand ce journaliste est sans conscience. La lettre exige une réponse, souvent même plusieurs, & le journal se remplis, mais il est des abonnés difficiles qui veulent le plein & non le rempli ; & qui lorsque les lettres se multiplient, retirent ou cessent leur abonnement. L’expérience apprend que l’usage fréquent de lettre au rédacteur est dans un journal un symptôme évident de caducité.

LIBELLE : il vient de libellus, qui veut dire en latin petit livre, c’est presque toujours moins en françois. Dans l’ancien régime, l’homme assez ennemi de sa liberté pour coucher par écrit les turpitudes d’un ministre, d’un homme puissant ou de leurs maîtresses, étoit appellé un faiseur de libelles, & son œuvre une libelle séditieux, parce qu’alors on ne pensoit point encore au mot incendiaire, qui, chez les républicains, est le synonyme de séditieux. Auteur, imprimeur, libraire, colporteurs, tout ce qui avoit contribué à la publicité de l’œuvre inique, étoient jettés dans les cachots de la Bastille, d’où ils ne sortoient, en cas qu’ils sortissent, que quand l’homme aux turpitudes avoit enfin fait la culbute. L’ancien régime avoit tout exprès une meute, rue des Capucines, pour relancer