Page:Chants et chansons populaires de la France.djvu/70

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La Convention vota une fête à sa mémoire, une pension à sa mère ; Chénier et Collin d’Harleville lui offrirent, dans leurs vers, le tribut de l’admiration nationale.

Le second exemple de ce dévouement précoce n’est pas moins héroïque. Les insurgés marseillais allaient traverser la Durance, et écraser par la supériorité du nombre une faible troupe de soldats républicains. Un seul moyen de salut restait à ces derniers, c’était d’aller couper, sous le feu de l’ennemi, les câbles du ponton déjà tombé en son pouvoir ; mais une si périlleuse entreprise fait hésiter les plus braves… Soudain un enfant de treize ans s’élance : c’est Joseph-Agricole Vialla, qui saute sur une hache, vole aux bords du fleuve, et frappe sur le câble a coups redoublés. Plusieurs décharges de mousqueterie sont dirigées contre lui : il continue à frapper avec ardeur… Enfin, atteint d’une balle et mortellement blessé, Je meurs, mais c’est pour la Liberté ! telles sont ses dernières paroles. La mère de ce jeune Spartiate se montra digne de lui avoir donné le jour. En apprenant cette perte cruelle, sa douleur fut profonde ; mais quand on lui eut raconté l’admirable dévouement de son fils. — « Oui, dit-elle, il est mort pour la patrie ! » et ses larmes cessèrent de couler.

En regrettant que ces deux traits n’aient pas eu lieu dans une lutte contre l’étranger, la France doit s’enorgueillir de pareils enfants, et savoir gré à la lyre qui a célébré leur courage.

Le Musicien ne resta pas au-dessous du Poète. Exalté par cette belle composition, Méhul en doubla le prix par ses énergiques accords. Ajoutons, comme une circonstance mémorable, qu’ils furent tracés en quelques instants, sur le coin d’une cheminée, et au milieu des causeries d’un salon.

Ainsi, trois des plus remarquables productions lyriques de nos jours sont nées d’improvisations du génie. le Chant du Départ, comme on vient de le dire ; l’air Ô Patrie ! du Tancredi, nommé en Italie l’Aria dei Rizzi, parce que Rossini le composa pendant qu’on apprêtait le riz de son repas ; enfin, la Marseillaise, qui, nouvelle Pallas, en quelques moments d’une nuit déjà très avancée sortit tout armée du cerveau enflammé de Rouget de l’Isle.

Exécuté d’abord par l’orchestre et les chœurs du Conservatoire de musique, dans la fête nationale de 1794 qui célébrait le souvenir de la prise de la Bastille, le Chant du Départ devint promptement populaire ; il fut accueilli avec transport par nos armées, qui le baptisèrent du nom honorable de frère de la Marseillaise. Il est, en effet, aussi beau de majesté et d’énergie que l’autre de verve et d’enthousiasme. Ces deux Chants belliqueux entraînèrent des légions de volontaires à la défense de nos frontières menacées, et décidèrent souvent la victoire. Leur souvenir restera toujours inséparable dans les glorieuses annales des guerres de l’indépendance nationale.

N. …