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Page:Chapman - Le Lauréat (critique des œuvres de M. Louis Fréchette), 1894.djvu/20

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De tons fades avait jauni le champ vermeil,
Et sur la roche, hélas ! sommeillaient au soleil
Deux compagnons de saint Antoine.

Quelle profanation !

Et dire que cette monstruosité est d’un Canadien, qu’elle est passée inaperçue, qu’elle n’a pas tué du coup M. Fréchette sous le poids du ridicule et du mépris !

Peut-on s’étonner, après cela, que notre public n’ait pas remarqué les vols que le Bon Combat signale depuis quelque temps, et qui prouvent clairement que notre lauréat n’est qu’un audacieux plagiaire ?

Oui, c’est M. Fréchette qui, à l’âge de trente-deux ans, a eu l’imagination, le jugement, la fierté, et surtout la dignité de mettre des compagnons de saint Antoine là où les fauvettes se penchaient pour écouter ce qui se disait d’ineffablement tendre entre lui et son adorée.

Oui, mes chères lectrices, c’est M. Fréchette, que votre imagination vous faisait voir comme un poète, un chercheur d’idéal, qui a trouvé sur la roche perdue au loin dans la bruyère en fleur deux pourceaux pour l’y remplacer avec celle à qui il avait murmuré, peut-être à genoux, le mot le plus suave que des lèvres puissent adresser à la créature comme à Dieu même : — Je t’aime !