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les invincibles

Étreignant dans leur serre un lambeau de leur âme
En ces voiles sombrant à l’horizon de flamme ;
Et parmi les blés mûrs du rivage vermeil
Caressé par le flot, la brise et le soleil,
Des sanglots éclataient, mêlés aux rumeurs vagues
Montant des bois, des champs, des roseaux et des vagues.

Parfois de longs hourras, cris rauques de forbans,
S’élevaient tout à coup des ponts et des haubans,
Narguant les paysans qui pleuraient sur les grèves.

Et les voiles passaient, passaient comme des rêves.

Partout, sur les tillacs, dans les mâts, aux hublots,
Les Anglais, promenant leurs regards sur les flots,
S’extasiaient devant le spectacle féerique
Du plus majestueux des fleuves d’Amérique,
Et, rayonnants, le front brûlé d’un seul désir,
Dans leur cœur savouraient d’avance le plaisir
D’attaquer Montréal râlant sur des décombres.

Et les voiles passaient, passaient comme des ombres.