Page:Chaptal - Mes souvenirs sur Napoléon.djvu/150

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suite de sa conception générale de l’univers, il a une tendance à appliquer à tous les faits qu’il étudie, de quelque nature qu’ils soient, les procédés de la chimie. En cela, il devance son siècle. Mais ce qui est la marque propre de son esprit (et on y reconnaît la trace qu’a laissée en lui l’école de Montpellier), c’est qu’il n’a pas la répugnance de quelques positivistes pour les faits d’ordre purement moral ou politique. Il les met sur la même ligne que les autres. Il leur donne même une place d’honneur. C’est ainsi qu’il sacrifie toutes ses préférences pour les principes sacrés de l’économie politique, le jour où il aperçoit, dans les conséquences extrêmes du régime impérial, le moyen d’organiser un système commercial ou industriel d’où la France puisse tirer quelque avantage ou quelque soulagement, même momentanés. Il admire, à travers les pages les plus sanglantes de notre histoire, le développement prodigieux du travail national. Il n’a pas l’idée que nos succès économiques sont peut-être payés bien cher. La production chimique de la betterave et celle de l’indigo lui paraissent, en regard du sang versé, des résultats après tout consolants, puisqu’il n’a pas pu en être autrement[1]. La nature saura bien, se dit-il, réparer toutes ces forces perdues.

  1. Dans ces pages où il parle de l’industrie française, en poète inspiré, il oublie de citer ses propres découvertes. C’est pendant