Page:Chaptal - Mes souvenirs sur Napoléon.djvu/52

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nesse, ces sentiments généreux qui la caractérisent.

Je n’ai pas retrouvé, depuis cette époque, un seul de mes nombreux auditeurs qui ne m’ait rappelé ce moment.

Si cet incident eût été dénoncé au Comité de salut public, il eût fourni encore un bel acte d’accusation contre moi.

De retour à Montpellier, je repris mes cours de chimie dans mon ancien amphithéâtre ; mais c’est à peine s’il pouvait contenir les mille ou douze cents auditeurs qui s’y pressaient deux ou trois heures avant mes leçons.

Mon absence forcée avait été désastreuse pour mes intérêts particuliers. La suspension totale des travaux de ma fabrique, le maximum et les assignats avaient dévoré presque toute ma fortune. J’évaluais ma perte à 500,000 francs. Mais un événement heureux me fournit les moyens de la réparer. On venait de conclure la paix avec l’Espagne, qui restait toujours en guerre avec l’Angleterre. Les fabriques de Catalogne, qui s’étaient approvisionnées jusqu’alors chez les Anglais d’acide sulfurique, d’eau-forte, de couperose, de sel de Saturne, etc., furent obligées de recourir à moi. N’ayant pas de concurrents, je mis un prix très élevé à mes produits ; en un an, je fis un bénéfice de 350,000 francs : j’eus encore l’avantage d’habituer les Espagnols à mes produits, et je chassai