Page:Charbonneau - Aucune créature, 1961.djvu/117

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tains indices que Carrel n’avait peut-être feint de se retirer que pour éprouver la loyauté des siens et mesurer l’étendue de son autorité. Alors que selon la rumeur, la maladie allait le forcer à la retraite, n’avait-il pas, du parquet même de la Chambre, prononcé un discours retentissant qui ressemblait moins à un adieu qu’à un programme électoral. Pourtant les rumeurs persistaient.

« Je vous attends samedi, répondit Carrel. Nous passerons le week-end ensemble. »

Georges Hautecroix descendit du train à dix heures du matin dans la ville près de laquelle habitait le chef nationaliste. Vibrant d’émotions contradictoires, il s’engagea dans une petite rue commerçante, flânant entre les rangées de maisons qu’il connaissait, retardant à plaisir le moment de se présenter chez son hôte.

Blaise Carrel ne savait qu’un rôle : celui de chef. Il l’avait été au collège, à l’université, puis dans les sociétés qu’il avait fondées et enfin, dans le parti nationaliste. Georges avait assisté avec son père — il n’avait que vingt ans — au congrès qui avait choisi Carrel comme chef. Les jeunes, que l’homme politique écoutait volontiers à cette époque, lui avaient fait une fête. Il était entré dans l’amphithéâ-