Page:Charbonneau - Aucune créature, 1961.djvu/81

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— Vous me faites regretter de ne pas avoir connu ce milieu.

— Le monde canadien s’éveillait aux choses de l’esprit. C’était le temps des revues littéraires, des premières tentatives d’édition, des Jeune-Canada et de la Relève. Quelque chose bougeait…

Il s’arrêta brusquement. Il s’était laissé porter par le flot des souvenirs. Il parlait rarement de son passé ou le faisait incidemment et à propos des autres. Les écrivains n’ont que trop tendance à mettre leur âme à nu, même devant des étrangers. Leurs réactions vives les peignent, leurs jugements à l’emporte-pièce trahissent leurs émotions. S’analysant sans cesse et se connaissant mieux, ils parlent avec plus de pertinence d’eux-mêmes. Mais ils risquent ainsi de donner une idée fragmentaire d’eux-mêmes qui, interprétée en dehors de sa perspective, les trahit.


Il ne revit pas Sylvie. Il se plongea dans une activité de tous les instants. Il avait con-