Page:Charbonneau - Aucune créature, 1961.djvu/88

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Georges faisait tout avec passion. Ses romans représentaient une somme de moments de grande intensité. L’œuvre portée rapidement à un sommet était ensuite reprise à ce sommet et portée plus haut. Parfois, elle n’était que sommets, d’où la difficulté de lire ces livres d’un seul trait, comme s’ils avaient été écrits horizontalement et non en hauteur — et leur impopularité.

Pour son premier roman, il avait utilisé une sorte de journal, où chaque incident était transposé, repris à la troisième personne, travail aimé, naturel, sans retour en arrière, exécuté dans la joie la plus pleine, la plus exaltante. Dans ce livre, il était vraiment lui-même sans garde-fou, sans méthode. Les images s’enchaînaient en toute liberté et tant pis pour les inconséquences ! Il avait rédigé cet essai d’abord dans un cahier puis pour plus de commodité sur des cartes, des blocs-notes et des feuilles libres. Les idées se déroulaient capricieusement, au gré des impulsions que le jeune homme recevait de l’extérieur. Quelques-unes des pages les mieux venues avaient été écrites debout, l’avant-bras appuyé sur la console de la cheminée, sur le piano ou sur le bord de sa table d’étude. La nuit, incapable de dormir, il retournait à son bloc-notes.