Page:Charbonneau - Aucune créature, 1961.djvu/87

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Georges, ayant pris cet engagement, se tourna vers son cahier.

Quand il commençait un travail, son expérience le portait à se méfier d’un plan trop élaboré. Il voulait bien savoir où il allait et son prologue indiquait parfois la fin du récit et par quelles étapes il allait y atteindre, mais l’ordre et l’organisation de l’intrigue continuaient de changer jusqu’à la fin. Une page, qui, le roman terminé allait se trouver au début, avait d’abord été écrite en prolongement d’une situation restée au milieu ou à la fin. De tels textes avaient alors un double emploi ; ils servaient de jalon au plan puis prenaient leur vraie place dans la version définitive. Certains passages changeaient ainsi deux ou trois fois de place. Parfois même, ils disparaissaient complètement.

Georges tenait d’abord une sorte de journal de ses personnages. Il voulait les connaître dans leur intimité à chaque heure de la journée. Le récit s’organisait autour d’un petit noyau de notes, mais les faits ne l’intéressaient qu’au second degré, repensés à propos d’un personnage, incorporés à son destin. Celui-ci était d’abord une âme qui s’incarnait peu à peu.