Page:Charbonneau - Fontile, 1945.djvu/94

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il fréquentait en célibataire chez son frère et chez le docteur Desartois. Quand il restait quelque temps sans les visiter, sa femme lui disait :

— Va t’ennuyer chez tes snobs si le cœur t’en dit…

Devant une femme de cinquante ans, vulgaire, de caractère tyrannique, on se prend à rêver aux charmes depuis longtemps résorbés, dont la trace même a péri, qui ont naguère inspiré l’amour. Elle avait dû être jolie, autant que ce genre de femme peut l’être. Maintenant elle faisait songer à une vipère : ses yeux étaient cernés de violet, le bas du visage avait amolli. Devant les hommes, elle retrouvait un rire de garce.

Son mari n’avait pas été mieux préservé. Il avait le crâne et la bouche dégarnis et souffrait d’une affection cutanée qui, à la moindre émotion, lui envoyait au visage une poussée de sueur adipeuse et nauséabonde. Pour éviter d’incommoder, il se parfumait. Timide et obséquieux avec les puissants, il écrasait les petits de sa