Page:Chardon - Antonia Vernon.djvu/13

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Le jour commençait à baisser. La douce enfant sembla s’en apercevoir tout à coup, et elle se remit à marcher ; mais maintenant sa marche était plus vive et plus légère ; tous ses mouvements avaient quelque chose de pressé, de joyeux, pour ainsi dire, qui indiquait une âme réconfortée. Lorsque la réflexion produit ainsi une satisfaction réelle, c’est que les peines que l’on éprouve, quelque profondes qu’elles soient, n’ont rien de cette amertume que laissent au fond de l’âme les torts qu’on peut avoir à se reprocher.

La pauvre jeune fille s’avançait dans sa route, comme elle s’avançait dans la vie !… Le chemin était long, fatigant, glacé, mais elle avait du courage, de la patience et de la jeunesse ; avec cela… on marche et l’on devrait arriver ; mais… les accidents… Il ne pouvait guère s’en trouver sur cette large allée du bois. On y voyait seulement quelques rares voitures commençant une promenade que l’hiver ne permettait plus de faire après le dîner ; on voyait aussi passer quelques personnes à cheval, de celles que l’hygiène plutôt que le plaisir conduit au bois. Puis, de temps à autre, on rencontrait marchant lentement sur le bord des* allées ou assis sur un banc, en dépit de l’âpre té de la saison déjà froide, de ces pauvres êtres qui semblent honteux d’exister, dont le visage et les vêtements trahissent les regrets et la misère, qui s’amoindrissent, se dissimu-