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Cependant que le forgeron s’embesognait, mais en vain, à la consoler, entra un marchand de vins suivi de bien trente et trois valets, portant chacun plein panier de bouteilles enfermant vins précieux, ainsi que le témoignaient la façon desdites bouteilles.

Quand la femme les vit, elle fut de désespérance abattue et le courage lui faillit : « Entrez, » dit-elle bien lamentablement, « entrez céans, messieurs les marchands de vins : la cave est en bas. Vous avez là bon nombre de bouteilles, six vingt assurément. Ce n’est trop pour nous qui sommes riches, riches de misère, vermine et pouillerie ; entrez céans, messieurs, là est la porte de la cave. Mettez y tout et davantage, si le voulez. »

Et poussant Smetse : « Tu es joyeux, sans doute, » dit-elle, « car c’est beau spectacle à un ivrogne, comme tu es, voir tout ce bon vin entrer de gratis en la maison. Ha, il rit ! »

— « Oui, femme, » dit Smetse, « je ris d’aise, car les vins sont à nous, à nous les viandes, à nous les pains et fromages. Éjouissons-nous à deux ensemblement, » Et il la voulait embrasser ; mais elle, se dégageant : « Ha, » dit-elle, « il fait dettes, il ment, il rit à sa honte : il a tous les vices, nul n’y manque. »

— « Femme, » dit Smetse, « tout est à nous, je