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sac, puis ainsi de l’emmener à Middelburg, en Walcheren, et là de demander à la commune qu’il me soit permis de faire bâtir, sus le marché, un bon petit fourreau de pierre, d’y enclore Votre Majesté et d’en laisser seulement sortir sa trogne mélancolique. Ainsi logée, elle pourra voir de près le bonheur, joie et richesse des réformés : ce lui sera plaisir bien grand, qui pourra être augmenté, aux jours de foire et de marché, par quelques félons soufflets qu’on lui baillera au visage, quelques traîtres coups de bâton ou quelque boue peu respectueuse. Vous aurez, en outre, Sire, l’indicible satisfaction de voir de Flandres, de Brabant et de vos autres pays tant ensanglantés de votre fait, moult bons pèlerins venant à Middelburg payer en beaux écus de bâton leur dette antique à Votre Majesté miséricordieuse. »

— « Je ne veux, » dit le diable, « cette honte ; prends, forgeron, prends le parchemin. »

Smetse ayant obéi vit que c’était bien le sien, et l’étant allé tremper en l’eau bénite le parchemin se fondit en poussière.

Ce dont il fut bien joyeux et il ouvrit le sac au diable, duquel les os brisés furent joints incontinent l’un à l’autre. Et il rentra en son corps maigre, ses poux rongeurs et sa dévorante pourriture.