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aise de ma délivrance suffisamment. Serait-ce quelque diable encore ? Car l’on dit qu’ils se mussent sous toutes formes. « Çà, » dit-il au chat, lequel fouffait par grande épouvante, « as-tu ouï, entendu et compris, diable chat ? Je suis quitte et libre, quitte et franc, quitte et joyeux, quitte et riche. Et j’ai fait quinauds tous les diables. Et d’ores en avant festoierai-je allègrement ainsi qu’il convient à un quitte forgeron. Femme, j’entends qu’aujourd’hui on envoie à Slimbroek cent philipdalers, car le pauvre méchant se doit aussi tantôt éjouïr de ce que Smetse est quitte. »

Mais la femme ne répondit mot, et le forgeron la cherchant la vit descendant l’escalier et tenant ès mains un grand bassin plein d’eau bénite, en laquelle trempait belle branche de buis des Rameaux.

Entrée en la forge, la femme commença de ladite branche à asperger son homme et les manouvriers et aussi les marteaux, enclumes, soufllets et autres utils.

— « Femme, » dit Smetse essayant d’échapper à l’eau, « que fais-tu ? »

— « Je te sauve, » dit-elle, « forgeron présomptueux. Cuides-tu, de vrai, être libre des diables, cependant que tu possèdes les biens qui sont à eux ? Cuides-tu même, puisqu’ils n’ont plus ton âme qui était le prix de ta richesse, qu’ils te vont laisser ladite richesse ? Ha