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le peuple du pôle

endormi, sur la bouteille de cognac à moitié vide et, peu à peu, je repris complètement le sentiment de la réalité : « Je me serai endormi, j’aurai rêvé, pensai-je… Cela doit être un rêve, cela ne peut être qu’un rêve… » Mais c’était en vain que je me répétais ces mots ; je ne parvenais pas à bien me convaincre.

Je résolus de lutter énergiquement contre la fatigue afin de me rendre compte de ce qui se passerait. Je m’assurai que mon revolver était chargé, je le posai près de moi sur une planchette et j’allumai un cigare. Des minutes longues comme des siècles s’écoulèrent dans l’anxiété de l’attente. Je ne vis rien. Ensuite il me sembla entendre comme un frôlement au dehors ; je fis deux pas, m’arrêtai… Tout était déjà redevenu absolument silencieux. Alors, ayant reporté mes yeux sur le hublot, je vis la face qui m’épiait.

Je la vis, ou plutôt je l’entrevis à peine, durant une demi-seconde ; mais ce temps m’avait suffi pour ressentir la plus intense impression d’horreur. Comment la rendre ici ? où trouver des mots pour me faire comprendre ? Imaginez l’effet que peut produire quelque chose d’impossible… et de quasi tangible en même temps. Car, cette fois, je n’avais pas rêvé, j’en étais sûr, j’avais vu, bien vu la face de cet être : un front proé-