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Page:Charles Derennes Le peuple du pôle 1907.djvu/214

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le peuple du pôle

À mesure que je m’enfonçais vers le centre de ce monde souterrain, ils devenaient de plus en plus nombreux, et l’horreur de leurs blessures croissait avec le nombre ; il était manifeste que, de meurtre en meurtre, Ceintras avait atteint la suprême exaltation de l’ivresse sanguinaire. Souvent, après avoir abattu avec son revolver, plusieurs monstres, il s’était acharné sur eux avec son couteau… Les coups de feu presque toujours tirés à bout portant avaient défoncé les faces ; des lambeaux de chair pendaient comme des rubans rougeâtres au cou de quelques victimes, toutes droites dans un angle où l’assassin les avait acculées. Je n’oublierai jamais le globe oculaire de l’une d’elles, qui arraché de l’orbite, pendait au bout d’un nerf comme une perle énorme et pâle… Chancelant déjà devant cette atroce boucherie, je continuai ma marche avec peine au milieu de l’ombre que trouait faiblement ma lanterne ; et je m’entravais parfois dans les intestins d’un monstre éventré.

Combien de temps cela dura-t-il ? Le jour parut soudain et, un peu plus tard, je commençai à entendre quelques détonations que les échos des couloirs et des salles répercutèrent à l’infini. Un instant j’hésitai à poursuivre ma route, puis